Fou mais pas con (Valvert)

Un documentaire qui laisse sans voix. Le nouveau film de Valérie Mréjen (surtout connue pour ses œuvres plastiques) raconte l’univers d’un hôpital psychiatrique hors du commun. Sa particularité est d’être ouvert. Les patients peuvent se déplacer librement à l’intérieur de l’enceinte, ils ne sont pas, comme dans d’autres établissements, sous une surveillance quasi-pénitentiaire. La réalisatrice interroge sur cette institution et ses problèmes (manque de moyen,de personnel). Dans un champ toujours ouvert, les malades se promènent tranquillement dans le cadre, le traverse sans jamais faire attention au dispositif mis en place, comme si ce n’était qu’une sorte de nouvelle lubie de leur cerveau. Valérie Mréjen parvient donc à obtenir des séquences d’anthologie et pose un nouveau regard sur le milieu asilaire. Les interviews toujours perturbées par l’apparition d’un patient montrent parfaitement ce qu’est la liberté selon Valvert. On est loin des propos aseptisés. Schizophrènes, paranoïaques, ou encore souffrant de troubles de la parole, il y a chez tous les patients quelque chose de l’ordre de la non communication. Ils sont comme des corps vides, sans esprit, chez qui la pensée vient à disparaître. Et tout comme chez les zombis des premiers Romero, l’échange devient impossible.

Ici, charabia, morceaux de phrases, mots manger, tout se superpose. Les patients tentent d’exister dans une forme de parole ou par la présence. Une séquence reste marquante. Un malade s’avance vers la caméra et dit « je suis là » une fois sorti du cadre, ne laissant apparaître que son épaule. Dans une société qui a tendance à cacher tout ce qui fait désordre, il y a, ici, une conviction de montrer que toutes ces personnes existent et que ce n’est pas en les cachant de la vision des biens pensant que l’on peut les faire disparaître. Au contraire La réalisatrice cherche cette intrusion, elle sait qu’en filmant dans cet établissement, il y aura forcément des dérapages et qu’elle ne pourra pas faire un film « clean », sans malades. Avec de la réserve et du respect, elle arrive à donner beaucoup sur les pensionnaires et sur les employés. Dans les gènes face à certaines conversations, elle ne coupe rien et au contraire laisse divaguer sa caméra montrant ainsi le quotidien de ces personnes.

Valérie Mréjen fait de Valvert un documentaire rare en tout point de vue. Elle a la compréhension des propos et filme avec une profonde empathie. Une œuvre forte tant sur le plan intellectuel que mental.


Valvert
un film de Valérie Mréjen, sortie le 10 mars 2010

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