Avec son deuxième film, l’ancien critique des Cahiers du cinéma Cédric Anger poursuit son analyse du polar. Toujours sous l’influence hitchickoco-de-palmienne de son précédent film Le Tueur le cinéaste ne parvient pas à atteindre les noirceurs de la psychologie humaine comme le fait Le Petit lieutenant de Xavier Beauvois (dont Anger était le scénariste). L’Avocat déçoit non pas par la mise en perspective d’un pseudo pacte faustien dans le milieu du droit, mais dans la chute finale et dans la composition des personnages.
Léo (Benoît Magimel) vient de finir ses études de droit et commence sa carrière dans un grand cabinet d’avocats. L’occasion poindre pour faire évoluer sa carrière d’un grand coup, il va devenir le protecteur judiciaire attitré d’un mafieux du coin (Gilbert Melki) dont les affaires sales trempent dans le recyclage de déchets toxiques. Cette fulgurante ascension va alors marquer un véritable changement dans la vie du jeune Léo qui, comme Faust dans la pièce éponyme de Goethe, ne devra son salut que par le sauvetage d’une âme pure, Marguerite pour l’auteur allemand et Eve (Aïssa Maïga) dans le film. Le film aurait sûrement tenu la route si le casting ne se complaisait pas dans une attraction d’acteurs stars. Magimel semble mal à l’aise, étriqué dans les costumes cintrés du jeune prodige, tandis que Melki n’est absolument pas convaincant dans le rôle d’un gangster qui recycle.
Ce qui tarit le film, c’est son schéma digne du purgatoire de Dante. Dès le début, un corps est amené a l’hôpital et comme une voix d’outre-tombe celui-ci va raconter son parcours jusque dans ce lieu entre la vie et la mort. On l’aura compris, il s’agit de Léo qui dans un dernier souffle tente de comprendre (et de faire comprendre) les chemins qui l’ont amené jusqu’à la dernière destination. Outre que ce dessin scénaristique devrait être banni depuis maintenant un certain temps, la sauce du film ne prend pas, justement parce que la solution est donnée dans les premières images.
Comme la plupart des critiques passés derrière la caméra, Anger ne peut pas s’empêcher d’agrémenter son film de citations cinématographiques, et toute la trame n’est ici ni plus, ni moins qu’un copié coller du prodigieux film de De Palma L’Impasse qui racontait sous le même dispositif la rédemption d’un ancien petit malfrat joué par Al Pacino. Il est dommage, à la différence de Le Tueur, qu’Anger n’est pas garder le côté suspense hitchcockien qu’il avait très bien su créer dans sa précédente histoire avec un personnage qui attend et s’ennui. Ici tout est donné trop vite, avalé et digéré.
Cependant, le réalisateur français possède de nombreuses qualités, comme son talent pour la mise en place de cadrages et de lumières qui lui servent ici, comme dans Le Tueur, à relater le trouble intérieur des personnages. Mais sans avoir une histoire qui tient la route et des acteurs qui puissent incarner les personnages pour que le spectateur s’immerge dans la totalité dans ce second film. Cédric Anger ne reste pas moins un très bon faiseur de film et même si ce deuxième coup d’essai ne le fera pas rester dans l’histoire du cinéma, on peut penser que celui-ci lui servira d’exercice pour parfaire sa technique de la narration et du rythme, deux éléments dont les polars français ont fortement besoin.
L’Avocat (sortie le 26 janvier 2011)
Un film de Cédric Anger
Avec Benoît Magimel, Gilbert Melki, Aïssa Maïga
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire