Un documentaire métaphysique et transcendant (Les rêves dansants, sur les pas de Pina Bausch)

Peu de temps avant sa mort, la chorégraphe Pina Bausch décide de reprendre sa pièce la plus connue, Konktakthof, sans sa troupe officielle mais avec des adolescents n’ayant jamais dansé. Anne Linsel et Rainer Hoffman, intrigués par le projet, suivent cette « star academy » pas comme les autres.

Ils offrent un documentaire hors du commun sur le monde de la danse et de l’adolescence. Des jeunes vont apprendre à danser mais aussi et surtout à découvrir leur corps. Car s’il y a bien une chose que met en avant ce film, c’est la découverte de soi par la danse. Si le cinéma ou la vidéo donnent une idée du corps, permettent de se rendre compte de sa représentation, la danse, quant à elle, en serait l’opposé par la construction de cette conscience dans la sensation. Les ados, au début mal à l’aise dans les mouvements, découvrent petit à petit toutes les particules qui font leur enveloppe. C’est avec la découverte de leur anatomie que la danse et la troupe vont prendre forme et devenir un personnage différent.

Les deux réalisateurs dans un soucis de réalisme s’effacent. La caméra semble cachée, elle ne gêne jamais les mouvements ou les émotions des adolescents. Par cette mise à distance du cinéma et de son dispositif, c’est tout l’attrait du film qui prend forme. On n’est plus dans une mise en perspective de la chorégraphie de Pina Bausch, mais dans la découverte d’artistes et de leur apprentissage. Il est hallucinant de voir dès les premières images l’aura de certains de ces jeunes danseurs. Les cinéastes captent la naissance de ce qui pourrait devenir de grand artiste, comme la jeune fille blonde timide qui finalement, par son incroyable présence physique, deviendra le rôle-titre de la pièce et du film.

Les Rêves dansants n’est pas seulement un documentaire sur la danse, c’est aussi une vision de la jeunesse allemande, de ses origines, ses sentiments et ses rêves. À travers des entretiens avec les adolescents, qui ponctuent leur apprentissage, les réalisateurs tentent d’en savoir plus sur eux et leurs motivations. À travers cette série de portraits, les jeunes peuvent s’exprimer, par la parole cette fois, sur tout et rien. Ces petites incursions permettent de comprendre que leur passé, leurs histoires les nourrissent pour exprimer au mieux les gestes de la chorégraphie. Ainsi, la perte d’un père se transforme en un mouvement du corps.

Le documentaire offre un véritable panel de visage et d’individus qui vont se confronter tout au long du film et finir par former une troupe à la fois filmique et scénique. Les derniers plans sur la scénographe Pina Bausch offrant des fleurs à ces nouveaux artistes clôture ce film dans un élan d’émotions. Dernières images avant la mort de ce génie de la danse qui donne son héritage à une jeunesse prometteuse.


Les Rêves dansants, sur les pas de Pina Bausch (sortie le 13 octobre 2010)
Un film de Anne Linsel et Rainer Hoffman


1 commentaire:

  1. Okay, mon petit Ben, mais quid de certains choix hasardeux du film ? J'ai pas détesté ce qui tient plus du joli reportage que du vrai documentaire, mais j'avoue avoir été scandalisé par les petits moments "Star Academy" où le film joue sur un vieux suspense type "qui va rester ?", avec forces interviews en montage alterné : "Alors, t'as été prise, contente ?" (je veux dire, on a coupé les questions, mais c'est évident que ce sont les mêmes que celles du "confessionnal" d'un pauvre Loft Story).
    C'était vraiment dommage de faire un truc comme ça, ça réduit beaucoup du propos du film, qui de toute façon a été compris/asséné très vite.

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